Le radon, le gaz radioactif, ennemi de l’intérieur
Francoise Mesle, membre de l’association « UFC Que Choisir », présente un détecteur de gaz radon le 18 janvier 2018 à Rezé
© AFP JEAN-FRANCOIS MONIER
Rezé (AFP) – Inodore et incolore, le radon provoque jusqu’à 3.000 morts
par an en France. Ce gaz radioactif, deuxième cause de cancer du poumon,
reste pourtant méconnu du grand public, malgré plusieurs campagnes
d’information locales.
Une quarantaine de personnes sont réunies ce jeudi soir de janvier dans
une petite salle éclairée au néon de Rezé, dans l’agglomération
nantaise.
A l’entrée, chacun s’est vu remettre un kit avec un dosimètre, à peine
plus gros qu’une pièce de deux euros. Le petit appareil en plastique
noir devra être installé pendant deux mois dans leur logement avant
d’être analysé en laboratoire. Objectif: connaître son exposition au
radon, un gaz radioactif qui émane du sol par la décomposition de
l’uranium présent dans les roches granitiques ou volcaniques.
« On se prémunit d’autant mieux d’un risque qu’on le connaît
parfaitement », explique Jean-Pierre Sarrazin, de l’association UFC Que
Choisir. « Vous pouvez manger vos radis sans soucis », ajoute-t-il à
l’adresse d’une femme qui lui demande si le radon peut contaminer les
légumes de son potager.
Yves Judic, 64 ans, qui habite Saint-Herblain, est lui venu en espérant
être rassuré, un peu moins de deux ans après la mort de son épouse d’un
cancer du poumon. « C’est un problème qui me trotte dans la tête
depuis », raconte-t-il. « Ma femme fumait, mais pas tant que ça, et j’ai
une grosse cheminée en granit chez moi ».
L’UFC Que Choisir organise ce genre de réunions d’information quatre
fois par an environ en Loire-Atlantique. Dans ce département, 80% des
communes ont un « fort » potentiel radon, en raison du sous-sol
granitique.
A Rezé, l’adjoint au maire est venu prononcer quelques mots
d’introduction. Mais, d’habitude, « les élus sont réticents, ça ne leur
plaît pas forcément de dire que leur commune est en risque fort. Et ils
croient qu’on va faire passer des messages anxiogènes », explique Gérard
Allard, vice-président de l’UFC Que Choisir locale.
Le radon, classé cancérogène certain depuis 1987, s’immisce par les
fissures de la chape de béton et atteint des niveaux de concentration
très élevés si la maison n’est pas aérée, expliquent les intervenants.
« Être dans une zone émissive ne signifie pas que votre maison aura du
radon », précise Jean-Pierre Sarrazin. Parfois, une meilleure aération
peut suffire à régler le problème.
Encore faut-il en avoir conscience. Car la plupart des gens ignorent
jusqu’à l’existence même du radon. Selon l’Observatoire régional de la
santé, 58% des habitants des Pays de la Loire n’en avaient jamais
entendu parler en 2015, une région où une des (rares) campagnes de
sensibilisation a été menée récemment.
Le gaz est pourtant largement présent dans l’Hexagone : en Bretagne,
Pays de la Loire et Normandie, dans le massif central, les Pyrénées, une
partie des Alpes, les Vosges ou en Corse, Guyane et en
Nouvelle-Calédonie.
Parmi les collectivités en pointe sur le sujet, la ville de Nantes
distribue gratuitement depuis 2007 des dosimètres à 70 habitants environ
chaque hiver, une « démarche très volontaire » saluée par l’Autorité de
sûreté nucléaire (ASN).
La mairie a aussi fait des relevés dans les écoles publiques et engagé
des travaux lorsque les niveaux de radon étaient trop élevés, alors que
la réglementation ne l’y obligeait pas.
A Concarneau (Finistère), 5.000 dosimètres ont été distribués à la
population en 2013. Des actions similaires sont menées en Franche-Comté
et en Haute-Vienne en collaboration avec l’IRSN (Institut de
Radioprotection et de sûreté nucléaire).
Mais la plupart du temps, le radon ne fait parler de lui que lorsqu’une
école est évacuée en raison d’un taux anormalement élevé, comme en
Haute-Vienne en 2015 ou l’an dernier dans les Hautes-Alpes.
« Tout le monde a déjà vu des campagnes pour la prévention routière,
alors que la prévention pour le radon… », relevait ainsi Sophie
Eglizaud, ingénieure d’étude à l’Agence régionale de santé (ARS), lors
de la réunion de Rezé.
Selon la dernière étude publiée, le radon causerait entre 1.200 et 3.000
morts par an France. En comparaison en 2016, 3.477 personnes sont
mortes dans un accident de la route.
© AFP
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