Monsieur le Président de la République
Palais de l’Elysée
55, rue du Faubourg Saint-Honoré
75008 PARIS
Meyreuil, le 12 Octobre 2018
OBJET : CENTRALE BIOMASSE UNIPER GARDANNE URGENCE CONTRAT DE TRANSITION ECOLOGIQUE
Monsieur le Président de la République,
C’est avec gravité que nous nous adressons à vous aujourd’hui, à quelques jours d’un
rendez-vous important sur l’Environnement (18/19 Octobre).
Avec gravité, car cela fait plus de 8 ans qu’en tant que simples citoyens épaulés par des experts reconnus nous dénonçons auprès de tous les acteurs de la chaîne décisionnaire, Lettre a Macron sur la centrale Biomasse de Gardanne
les non-sens et aberrations sanitaires, écologiques, économiques, techniques, citoyens et stratégiques que la Centrale Uniper de Gardanne fait supporter aux salariés, aux riverains, aux citoyens et au pays tout entier.
Avec le souci de rester sur l’essentiel et sans entrer dans des considérations trop techniques, nous souhaitons vous présenter ici les principaux éléments susceptibles d’éclairer votre vision et vos décisions, dans la continuité de nos échanges de Février 2018 avec M.TERRASSE, représentant de Nicolas HULOT, alors Ministre de la Transition Ecologique et Solidaire, venu nous rencontrer à Gardanne.
Nous tenons bien évidemment à votre disposition et à celle de vos Services, les nombreux
courriers, rapports, dossiers, et études qui viennent confirmer tous les points évoqués ci-après.
La Centrale Uniper de Gardanne : une production au charbon à l’abandon, une conversion à la biomasse en échec, un incinérateur en pleine ville !
L’origine de cette Centrale se situe au milieu du 20 ème siècle, avec des équipements
implantés à l’époque en rase campagne, entre Gardanne et Meyreuil, et spécifiquement
étudiés pour extraire le charbon local et l’exploiter pour la production d’électricité.
Pour les 2 tranches encore aujourd’hui exploitées, désormais en pleine agglomération :
- la tranche 5 (centrale thermique au charbon, 600 MW/h, 33 ans d’âge) fonctionne
actuellement avec du charbon importé. Son arrêt serait programmé pour 2021, comme nous l’a annoncé M. TERRASSE.
- la tranche 4 (centrale dite "biomasse", 150 MW/h, 51 ans d’âge) fait l’objet d’une
tentative de reconversion, avec notamment utilisation de biomasse, tentative techniquement infructueuse depuis maintenant 3 ans.
ALNP - Centre Administratif et Social - Avenue Jean Petit - 13590 MEYREUIL
N° Identification Sous-Préfecture 013.102.4570 du 22.01.2003 Si elles fonctionnent, les deux entités pourront brûler, entre autres, et en quantités illimitées : du coke de pétrole, des goudrons et asphaltes, des matières bitumeuses, des bois traités (formica, bois plastifiés, peintures au plomb, xylophène…)
La Centrale Uniper de Gardanne : une aberration sanitaire
60 fois plus que l’incinérateur de Fos-sur-Mer, 28 fois plus que les normes autorisées :
voici le niveau de pollution subi par les milliers de riverains de cette Centrale et l’enjeu de santé publique qui en découle, selon les chiffres communiqués par les CSS (Comités de Suivi de Site) de Fos et de Gardanne.
Une audition d’experts organisée au Congrès américain le 25 septembre 2012 sur le thème
"Human health effects of biomass incinerators" a pointé les très graves menaces pour la
santé publique, dues aux particules fines et ultrafines, aux dioxines, etc. générées par la combustion du bois. Or il n’est pas prévu que la nouvelle installation biomasse soit équipée de lavage des fumées comme c’est le cas pour la tranche fonctionnant au charbon. Cette situation est totalement incompréhensible.
La voie publique, des écoles, des centres de vie et de commerce, des milliers d’habitations sont impactés par les rejets et déchets visibles et invisibles de la Centrale.
Pour la première fois, en 2017, des mesures de bruit ont été effectuées par un organisme
indépendant (Véritas) avec une méthode communément utilisée pour toutes les grandes
exploitations industrielles. Elles ont révélé clairement ce que nous dénoncions depuis des
années : la Centrale Uniper de Gardanne ne respecte pas les limites de bruit imposées par les arrêtés Préfectoraux. Et ce, dans des proportions importantes.
Par ailleurs, malgré de multiples demandes, aucune étude épidémiologique ou de santé
n’a été réalisée sur Gardanne et les communes environnantes impactées par la Centrale.
Face au manque total de visibilité et de mesures sur les effets à court, moyen et long terme sur la santé des salariés, des riverains et des citoyens qui vivent dans l’important périmètre de nuisance de la Centrale, il nous semble qu’a minima un principe de précaution s’impose, d’autant plus que les enquêtes publiques initiales n’abordaient que très partiellement ces sujets de santé publique.
La Centrale Uniper de Gardanne : une aberration écologique
Imaginez… sur les 20 prochaines années, en fonctionnement établi et continu, et en consommant 100 tonnes de bois à l’heure, cette Centrale va brûler l’équivalent en forêt de la surface de 1 752 000 stades de foot !
L’approvisionnement en bois actuel provient essentiellement des forêts tropicales d’Amérique du Sud, notamment du Brésil, avec un label PEFC très contestable. Le bilan écologique des transports - bateaux puis camions - ne fait qu’augmenter l’impact CO 2 .
A terme, Uniper envisage un approvisionnement "local", dans un rayon de 400 km.
Or, selon la récente étude commandée par l’ADEME sur les "Disponibilités forestières pour
l’énergie et les matériaux à l’horizon 2035", la demande sera nettement supérieure à la disponibilité nationale à l’horizon 2031-35. La ressource locale nécessaire n’existe pas
et la concurrence est rude avec l’usine de pâte à papier de Tarascon et avec d’autres centrales à biomasse. Certains médias évoquent une "guerre du bois".
Avec Uniper et ses achats massifs, cette guerre a déjà commencé au détriment des consommateurs : le prix du bois de chauffage (y compris les pellets) a augmenté de 30% depuis 3 ans.
Le Tribunal Administratif de Marseille l’a bien compris, soulignant en Juin 2017 "l’insuffisance de l’étude d’impact" du projet qui a "eu pour effet de nuire à l’information complète de la population" et le fait que "la structure actuelle de la filière bois-énergie ne permettra pas de répondre aux exigences de fonctionnement de la centrale", dont le besoin à l’horizon 2024 représente "37% de la ressource forestière locale disponible"
Ajoutons que l’argument utilisé par les industriels et certains gouvernements d’un intérêt de la production d’électricité par la combustion de biomasse pour une réduction des émissions de gaz à effet de serre (CO 2 ) ne tient pas : de nombreuses études internationales avancent que le bilan carbone d’une telle centrale biomasse est pire que celui d’une centrale à charbon !
La Centrale Uniper de Gardanne : un non-sens économique
Des propriétaires qui se succèdent, des emplois de plus en plus précarisés, un engagement de fonds publics de 1,4 milliards d’euros versés à l’industriel, un rendement dérisoire : arrêtons cette fuite en avant !
Charbonnages de France, Houillères de Provence, Endessa, E-on, Uniper, Uniper France
Power/Fortum… : une telle valse des propriétaires ne peut qu’être préjudiciable à tout
investissement long terme.
Les emplois existants sur le site, les emplois induits dans l’approvisionnement et les services connexes sont de plus en plus menacés par le sous-investissement chronique dans l’outil de production et les dérégulations néfastes des marchés.
Alors même qu’il a été décidé un engagement de fonds publics de 70 millions d’euros par an sur 20 ans - soit 1,4 milliards d’euros versés à Uniper.
Tout cela pour un rendement énergétique extrêmement faible : seulement 30% environ, très loin des exigences techniques imposées dans l’appel d’offre initial (obligation d’un rendement de 60%).
Avec la Centrale Uniper à Gardanne, qui n’intègre pas le principe de cogénération,
7 arbres brûlés sur 10 ne serviront qu’à polluer les environs et à participer activement
au réchauffement climatique !
La Centrale Uniper de Gardanne : une aberration technique
Des essais qui durent depuis 3 ans sans succès, des mesures contestables,
des nuisances qui perdurent… : ça ne marche pas !
Après 3 ans d’essais, durant lesquels la production biomasse n’a fonctionné que de façon
très épisodique - et jamais à pleine charge - il serait grand temps de stopper l’hémorragie et de procéder à des vérifications poussées et indiscutables sur :
- les résultats réellement obtenus,
- les dysfonctionnements persistants,
- les raisons profondes de l’incapacité à fonctionner,
- l’obsolescence et la vétusté d’une grande partie des installations,
- les nuisances toujours constatées,
- le respect des critères de conformité
…
Cela nécessite des contrôles continus et indépendants de l’activité, tant sur les plans
techniques et économiques (argent public), que sur l’ensemble des points touchant à la
santé publique et à l’environnement.
La Centrale Uniper de Gardanne : un non-sens citoyen
Des enquêtes publiques incomplètes, des CSS sous haute surveillance, un manque
cruel de dialogue et de transparence…
Nos territoires ont besoin de projets qui donnent du sens, sont utiles, rentables, non nuisibles et qui, comme l’indiquent vos engagements "impliquent tous les acteurs du territoire autour d’un projet de transition durable - élus, acteurs économiques, partenaires sociaux, services déconcentrés, citoyens - et "accompagnent les mutations professionnelles, en particulier dans les situations de reconversion industrielle d’un territoire"
Avec Uniper, nous sommes très loin de ces considérations !
La Centrale Uniper de Gardanne : un non-sens stratégique
L’excès de biomasse est un danger.
Et avec une couverture, en fonctionnement optimal, d’à peine 3% des besoins en
électricité de la région PACA, la Centrale de Provence est plus nuisible qu’utile…
Dans le cadre de ses prévisions énergétiques pour la période 2020-2030, l’UE s’est donnée
comme objectif d’atteindre 27% de couverture de ses besoins énergétiques par les énergies renouvelables.
Or, actuellement, 60% des énergies renouvelables produites en Europe sont issues de
la biomasse.
En 2016, la même UE dans le cadre de sa "Stratégie Forêt" a alerté sur le fait que si les "Plans d’Action Nationale pour l’Energie Renouvelable" étaient respectés, tous les arbres récoltés en Europe, sans exception, seraient nécessaires à des fins énergétiques.
Rééquilibrage du poids des différentes énergies renouvelables, décentralisation, amélioration de l’efficacité du réseau, réduction des consommations par un programme volontariste sur l’isolation…il y a tellement à faire avant de détruire des forêts entières !
Quelle place pour la Centrale Uniper de Gardanne dans ce contexte ?
Dinosaure sans avenir, elle est déjà remplacée de fait par :
- 2 équipements mis en fonctionnement en 2010 à Fos sur Mer (turbine à gaz de
420 MW) et en 2013 à Martigues (930 MW), distants de 50 à 60 km de Gardanne
seulement
- le doublement de la ligne électrique qui alimente Cannes et Nice à partir
de Manosque, et récupère la production électrique du Rhône et de la Durance.
La Centrale Uniper de Gardanne : un non-sens pour la France
Vous l’aurez compris, Monsieur le Président, cette Centrale va complètement
à l’encontre des engagements pris par la France et par vous-même, au niveau national (Plan climat) et international (COP21, One Planet Summit).
Avec un engagement de fonds publics de1,4 milliards d’euros il y a beaucoup mieux
à faire, vous en conviendrez, dans le cadre d’un Contrat de Transition Ecologique.
C’est pourquoi, nous vous sollicitons pour que soit programmé au plus vite l’arrêt pur
et simple de cette Centrale, quasi inutile, potentiellement dangereuse, assurément nuisible et ruineuse, tant pour la tranche 5 (charbon importé) que pour la tranche 4 (biomasse dont rien n’indique à date qu’elle fonctionnera un jour dans les conditions contractuelles initiales requises).
Ceci afin de faire en sorte de faire enfin avancer, à Gardanne, des projets viables
sur les plans stratégiques, sanitaires, écologiques, économiques et techniques.
Des projets générateurs d’emplois, pérennes, porteurs de sens et d’exemplarité
sur le plan local, national et international.
Nous, simples citoyens, sommes à votre disposition pour tout dialogue sur l’objet de ce
courrier.
Vous remerciant pour l’intérêt que vous porterez et les suites que vous donnerez à notre
demande, nous vous prions de croire, Monsieur le Président de la République, à l’expression de notre considération la plus respectueuse.
Pour l’ALNP (Association de Lutte contre les Nuisances et la Pollution)
et les Riverains de la Centrale Uniper de Gardanne,
Bernard AURIC,
Président de l’ALNP
ALNP - Centre Administratif et Social - Avenue Jean Petit - 13590 MEYREUIL
N° Identification Sous-Préfecture 013.102.4570 du 22.01.2003
Copies à :
. Monsieur le Premier Ministre
. Monsieur le Ministre de l’Action et des Comptes publics
. Monsieur le Ministre de l’Economie et des Finances
. Madame la Ministre des Solidarités et de la Santé,
. Monsieur le Ministre de la Transition écologique et solidaire
. Madame la Ministre du Travail
. Messieurs les Préfet et Sous-Préfet des Bouches du Rhône
. Monsieur le Député de la 10 ème circonscription des Bouches du Rhône
ALNP - Centre Administratif et Social - Avenue Jean Petit - 13590 MEYREUIL
N° Identification Sous-Préfecture 013.102.4570 du 22.01.2003
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